La psychothérapie différenciée

. Le psychothérapeute ne sera plus porteur d’une proposition unique de soin ou de soutien, il devra à chaque étape rester vigilant, ouvert et capable de s’adapter au rythme du sujet, que ce dernier en soit conscient ou non. Le thérapeute, de ce point de vue n’est ni un directeur de conscience ni un sachant mais un médiateur au service du sujet dans ses relations avec l’environnement, avec son intériorité – comment il se ressent – dans le but d’un retour à une harmonie intérieure. C’est d’abord un médian. Et son rôle vise à l’harmonisation entre trois composantes : sujet, objet et action.
Consulter l’article consacré à la pédagogie différenciée

La psychothérapie différenciée repose sur une première évaluation différenciée, laquelle évoluera au fur et à mesure de la progression du sujet. Cette évaluation n’est jamais définitive car la réharmonisation dynamique est permanente grâce à la plasticité neurale.
En d’autres termes, différencier, du point de vue psychologique, signifie analyser et adapter ses méthodes, l’environnement d’approche du sujet de manière à prendre en considération les besoins et caractéristiques d’un sujet face à la nécessité constamment renouvelée de faire face au soin de soi. La thérapie différenciée s’appuie sur une évaluation différenciée ou diagnostic différencié. (Avec quelques collègues, je prépare un questionnaire qui permettra d’avoir une première évaluation précise des stratégies cliniques à mettre en œuvre)

Face aux traumatismes graves il n’existe pas de solution ni de thérapie unique qui serait capable de venir à bout de tous les symptômes et signes pathologiques. Et ce serait une imposture de croire ou de laisser entendre la chose possible. Tout comme pour les polytraumatisés qui, de la salle de réanimation jusqu’au traitement de rééducation ambulatoire en passant par la chirurgie réparatrice, c’est une équipe complète de thérapeutes qui s’affaire auprès d’eux, en étroite collaboration et en synergie les uns par rapport aux autres. Dans le domaine des troubles psycho-organiques dont l’implication neurologique est souvent profonde, il n’en va pas autrement.
Ce processus en deux temps et neuf phases (Cf. Article : Faire face, les objectifs) ne se développe pas de manière linéaire. Il faut bien penser, d’abord, que la conscience n’est pas une, elle est constituée de multiples éléments qui, en outre, n’évoluent pas forcément selon les mêmes rythmes ni dans le même temps. Si une part élémentale progresse vers un but, une autre peut mourir, cependant qu’une autre viendrait à naître. Dans ce processus extrêmement complexe, la linéarité d’un progrès vers la guérison ne peut être envisagée. On comprend d’autre part que la dissociation peut être intégrée au processus de réparation.
Si nous avons des repères sur le processus de restructuration des fonctions neuronales vitales, les outils de consolidation et de réparation peuvent varier et leur usage dépendra alors de ce qui s’offre à l’écoute attentive des témoignages au jour le jour, un pas à pas incontournable, minutieux qui impose une attention continue.
Ainsi, quand l’on procède à la consolidation de la conscience de soi sur la base de ce que celle-ci a construit en dépit du traumatisme, on peut fort bien utiliser les ressources de la psychologie comportementale. Mais dans ce même temps où de nouvelles adaptations se consolident et s’installent dans la vie de la personne, des réminiscences, des rêves, des flashbacks, des crises parfois violentes… viennent perturber cette mise en ordre qui paraît alors chanceler dans un retour du chaos. La mise en ordre n’obéit pas à des lois de caractère linéaire, statistiquement convergentes. Il ne s’agit pas simplement de la remise en route d’un train avec une locomotive et des wagons qui la suivent dans le même sens. Nous sommes plutôt face à une structure chaotique au sein de laquelle des facteurs d’ordre parviennent à se placer comme autant de polarisateurs d’énergie mais sans lien apparent entre eux, tout au moins dans un premier temps.
En discutant du but et de la technique de la thérapie, on indique que la réconciliation des différentes strates de l’organisme n’est pas une tentative de guérison permanente, mais plutôt de réajustement permanent. La question fondamentale pour le thérapeute n’est pas de libérer le sujet de difficultés momentanées, mais de savoir comment l’aider efficacement contre des difficultés à venir.Organisation de la thérapie

La place de l’imaginaire, les images intérieures, la méditation et les rêves

Les rescapés adultes d’agressions sexuelles dans l’enfance

La sexualité dépend de marqueurs situés en amont de la constitution de la personnalité surtout quand le trauma est antérieur à la sexuation. Les facteurs sensoriels et émotionnels conditionnent, d’origine, la sexuation du sujet et les modèles sociaux. L’ensemble de l’image de soi, de « l’intégration corporelle » est en jeu. La thérapie doit en tenir compte en favorisant la réparation à l’origine de la conscience de soi. Tel pourrait être l’enjeu d’une refondation de la psychologie clinique, aux confins des neurosciences et de l’anthropologie.
Nos cadres conceptuels et notre approche clinique doivent être revisités dans la perspective d’une vision globale de l’être humain.

La psychologie clinique, dès son origine s’est appuyée sur le morcellement de l’organisme humain à l’époque en vigueur en médecine et en biologie. Les théories du trauma ont subi cette influence, donnant au symptôme cette qualité de morbidité que nous connaissons si bien. Nous avons donc laissé de côté la question de la finalité de ce dernier. Répondant à la question suivante : jusqu’où ce symptôme peut-il conduire l’organisme ? Dans la perspective d’une fragmentation de l’organisme, la réponse est clairement : Vers la mort ! Mais en élargissant notre approche, insérant l’histoire du sujet à celle de son environnement, tant d’un point de vue social, historique que culturel ou clinique, le symptôme apparaît alors beaucoup plus nettement comme un facteur de compensation possible à des fins ultimes de réparation d’une harmonie perdue. Sur quoi se porte cette compensation ?
Nous avons vu plus haut que la relation de la conscience, dans ses différents états, aux éléments les plus archaïques de l’organisme impose parfois des ajustements que cette conscience – ici le Moi des psychologues le Soi autobiographique de Damasio – n’a pas toujours su apporter alors que les nécessités de la régulation homéostasique l’exigeaient. Question de culture, de milieu social, familial, manque d’attention aux bruits des viscères, etc.

Les sourcesPar ailleurs, les progrès considérables des neurosciences ont permis une esquisse d’approche globale en intégrant le cerveau à l’ensemble de l’organisme, ce qui n’était guère évident jusqu’à l’orée des années 70. Au dualisme corps-Esprit, s’ajoutait un dualisme étonnant corps-cerveau. Ce dualisme persiste dans la vision computationnelle de l’organisme, réduisant celui-ci à une sorte de mécanique supplétive du cerveau. L’ordinateur et les périphériques en quelque sorte ! Mais un courant différent dont on connaît, en France quelques animateurs, A. Damasio, E. Varela, R. Davidson nous ouvrent des voies convergentes à celles de l’anthropologie, de l’archéo-anthropologie et de l’éthologie animale. L’espèce humaine appartient à la lignée des primates et, plus avant, nous sommes avant tout des mammifères. Et, par un étrange coup porté à notre orgueil, ce qui anime nos cellules n’est en rien différent de ce qui se passe au sein des cellules les plus primitives.

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